Réalité quotidienne
- Par asso-delire
- Le 14/06/2020
- Dans Textes en liberté
La première version de ce texte date de l'été 2004. Retrouvé en cette période de confinement, il garde une forme d'intemporalité, interrogeant notre rapport à la consommation. C'est pourquoi j'ai souhaité le partager avec vous. Lillie V.B.
Scène étrange qui se déroule là, sous mes yeux :
la ville - silencieuse, endormie - expose ses ordures.
Ses ordures ménagères, résultat du "tout consommable".
Emballer Empaqueter Conditionner
Fragile ? Polystyrène !
Fraîcheur ? Aluminium !
Le tout entouré
de plastique, de carton
Dans des sacs dans des bacs Séparer
Verre Plastique Métal
ORGANIQUE
- l’écologie, c’est bon pour la campagne -
Mais là, dans les rues de la ville,
tout en vrac on balance, on entasse, on empile
Et eux, ces hommes de la nuit ou du petit matin,
avec une extrême patience,
ramassent, nettoient, épurent.
RÉSILIENCE
Ils lavent l’espace qu’on ne respecte plus
Ils effacent les traces
qui pourraient témoigner
que même nos vies sont périssables.
Ils s’organisent, agissent avec méthode
Gestes efficaces, mains précises
Ils ramassent à la pelle
les immondices sur le sol répartis
La place est nette
… en surface…
Le sol s’imprègne
des marques résiduelles
de ces vies répandues
Ces vies qui s’égrènent
entre train-train quotidien
et loisirs récréatifs :
un peu de sport,
une once de spiritualité
on réussit presque à y croire
Oublier qu’en bas,
dans la nuit ou au petit matin,
ces hommes phosphorescents
libèrent l’espace
de ces chaînes qu’on voudrait briser.
"Les ordures, c'est tout ce qui est produit par les êtres humains dans une conjugaison d'efforts du télencéphale hautement développé et du pouce préhenseur et qui, selon le jugement d'un être humain déterminé, n'est pas bon pour..."
L'Ile aux fleurs, court métrage de Jorge Furtado (1989)